« logements évolutifs » : les nouvelles règles en matière d’accessibilité des logements aux personnes à mobilité réduite issues de la loi ELAN du 23 novembre 2018 (n° 2018-102)
Alors que le principe universaliste posé par l’article L. 111-7 du code de la construction et de l’habitation primait auparavant en matière de règles d’accessibilité des logements neufs, les logements existants étant seulement contraints, dans la plupart des cas, de maintenir les conditions d’accessibilité préexistantes. L’article 64 de la loi ELAN introduit un système de quotas d’accessibilité (20%) et étend l’obligation d’installation d’ascenseurs dans les bâtiments d’habitation collectifs neufs (I.) lesquels trouvent à s’appliquer aux opérations sur des logements existants dans certains cas, sauf à se prévaloir d’une situation permettant l’octroi d’une dérogation préfectorale (II.).
I. L’ÉVOLUTION DES DISPOSITIONS RELATIVES À L’ACCESSIBILITÉ DES LOGEMENTS AUX P.M.R.
20% de logements accessibles et pose d’un ascenseur à partir du R+3
La nouvelle rédaction de l’article L. 111-7-1 1° du code de la construction et de l’habitation (CCH) dispose que, pour tous les permis de construire déposés à compter du 1er octobre 2019, les logements neufs construits dans un immeuble d’habitation collectif (BHC) doivent respecter 20% de logements, et au moins un logement, accessibles aux personnes en situation de handicap tandis que les autres logements pourront être évolutifs.
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2018-772 DC du 15 novembre 2018, a jugé que les dispositions précitées, « suffisamment précises », sont conformes au bloc de constitutionnalité et répondent à « l’objectif d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi ».
En outre, l’article R. 111-5 du CCH dispose désormais que « L’installation d’un ascenseur est obligatoire dans les parties de bâtiments d’habitation collectifs comportant plus de deux étages accueillant des logements au-dessus ou au-dessous du rez-de-chaussée. », contre seulement trois étages auparavant.
Définition des logements évolutifs et des « travaux simples »
– Logements évolutifs :
L’article L. 111-7-1 1° du CCH définit le logement évolutif comme « répondant aux caractéristiques suivantes:
a) Une personne en situation de handicap doit pouvoir accéder au logement, se rendre par un cheminement accessible dans le séjour et le cabinet d’aisance, dont les aménagements et les équipements doivent être accessibles, et en ressortir ;
b) La mise en accessibilité des pièces composant l’unité de vie du logement est réalisable ultérieurement par des travaux simples ; ».
– Travaux simples :
Dans sa décision n° 2018-772 DC du 15 novembre 2018 (considérant n° 39), le Conseil constitutionnel a également défini les « travaux simples » au sens de la loi ELAN : « Il ressort des débats parlementaires que ces travaux simples sont ceux sans incidence sur les éléments de structure et qui n’impliquent pas de modifications sur les alimentations en fluide, les entrées et flux d’air et le tableau électrique. », précisés par l’article 3 de l’arrêté du 11 octobre 2019 (NOR:LOGL1833057A).
II. LE MAINTIEN D’UN RÉGIME HYBRIDE POUR LES IMMEUBLES EXISTANTS
L’applicabilité des règles d’accessibilité du logement neuf à l’existant est conditionnée
Dans un BHC existant, si l’accès permet à une personne en fauteuil roulant de le franchir (art. 1 arrêté 24 décembre 2015 NOR: ETLL1511145A) les logements qui font l’objet de travaux doivent seulement maintenir les conditions d’accessibilité existantes (art. R. 111-18-8 CCH) sauf lorsque ces travaux concernent la modification, l’extension ou la création d’un bâtiment ou d’une partie de bâtiment par changement de destination et que le montant de ces travaux est supérieur ou égal à 80% de sa valeur (art. R. 111-18-9 CCH) .
Dans ce cas, doivent être accessibles :
- les parties communes, extérieures et intérieures, même si elles ne font pas l’objet de travaux ;
- les places de stationnement, les celliers, les caves privatifs où sont réalisés les travaux ;
- 20% des logements où sont réalisés les travaux, s’ils sont situés en rez-de-chaussée ou desservis par un ascenseur, ou susceptibles de l’être ;
Enfin, 80% des logements situés en RDC ou desservis par un ascenseur devront être évolutifs.
La sollicitation de dérogations aux règles d’accessibilité pour l’existant reste possible
L’article R. 111-18-10 du CCH prévoit trois motifs sur le fondement desquels des dérogations aux règles d’accessibilité peuvent être sollicitées auprès du préfet de département :
- caractéristiques du bâtiment, notamment en raison d’impossibilités techniques (constructions existantes, PPR, etc.) ;
- rapport d’analyse établissant la disproportion entre les bénéfices et les inconvénients résultant de l’application des règles d’accessibilité ;
- contraintes liées à la préservation du patrimoine architectural.
L’éligibilité des immeubles à cette dernière dérogation est restreinte aux cas suivants : classement ou inscription au titre des Monuments Historiques, protection au titre des abords, insertion dans un site patrimonial remarquable ou encore, immeuble protégé au titre de l’article L. 151-19 du code de l’urbanisme.
Qu’est ce qu’un logement accessible ?
Les logements dans lesquels les aménagements permettent « à un habitant ou à un visiteur handicapé, avec la plus grande autonomie possible, de circuler, d’accéder aux locaux et équipements, d’utiliser les équipements, de se repérer et de communiquer » (article R111-18-1 du CCH).
Comment calculer la valeur d’un bâtiment ?
SHON (hors honoraires et charges foncières) X coût de la construction*
* en fonction de l’indice du coût de la construction des immeubles à usage d’habitation
Cf. article R. 111-18-9 du CCH
L’insuffisante définition des travaux sur existant
A l’instar des « travaux de transformation » la jurisprudence apporte peu d’éclairage sur la définition des « travaux de modification » portant sur un BHC existant.
Les travaux « d’extension » sont en revanche définis par les juges du fond comme :
« (…) les parties de bâtiments correspondant à la création de surfaces ou de volumes nouveaux dans les parties communes devaient respecter les dispositions prévues à l’article R. 111-18-1 tout comme les parties de bâtiments correspondant à la création de surfaces ou de volumes nouveaux de logement devaient respecter les dispositions prévues à l’article R. 111-18-2. »
CA Poitiers, 15/01/16, n° 14/02784